L’espoir démocratique libanais : comment envisager l’inflexion revolutionnaire

L’esprit de tout un peuple émerge tel un seul homme quand ses prétentions les plus modestes sont écartées.

Au pays du Cèdre, les multiples crises de 1975 à 2009 ont pris en otage les espoirs d’un système politique laïque causant par ailleurs des limites institutionnelles d’un autre ordre. 

Les jeux du pouvoir exécutif et législatif se débattant entre les influences confessionnelles et d’union nationale, l’électorat subit de manière constante le clientélisme, une forme d’échange social amenant à des certains degrés de corruption.  La crise que traverse actuellement le Liban depuis le 17 octobre, est donc multifactorielle, et trouve son écho dans la dénonciation du gouvernement, sa gestion administrative, économique du pays, et sa partisanerie confessionnelle à outrance. L’idéal revendiqué pourrait mener à un gouvernement indépendant des coalitions et de tout appareil politico-religieux. 

Cela amène rapidement à la démission du Premier ministre Saad Hariri mais profite à plusieurs récupérations politiques notamment celle du Hezbollah qui bloque le parlement et ses potentielles réformes. 

Enfin, après l’impressionnante organisation et communion pacifique du peuple libanais sur l’ensemble du territoire, mais aussi dans le monde compte tenu d’une diaspora conséquente estimée entre 4 et 14 millions de personnes, le Président, Général et ancien Premier ministre Michel Aoun a adopté un ton tranchant ce mardi à l’encontre des manifestants. 

« S’ils pensent qu’il n’y a pas de gens honnêtes au sein du pouvoir, qu’ils émigrent, car ils n’arriveront pas au pouvoir. » Michel Aoun. AFP/Reuters

Le président vise de surcroît les blocages de routes et d’institutions publiques qui semblent, à son avis, mener inévitablement à « une catastrophe ». Il répond par ailleurs à la demande populaire d’un gouvernement apolitique en la qualifiant d’irréalisable. Dans une volonté de dialogue, il critique l’absence de leader pour représenter les manifestants.  Inévitablement la rue libanaise s’est soulevée et des affrontements perdurent entre l’armée qui quadrille le secteur du palais présidentiel à Beyrouth, et les manifestants dont plusieurs ont été blessés et tués depuis le début des protestations.  Survenue après l’annonce de taxe toujours plus élevée, cette crise appuie sur les difficultés économiques et financières du pays. Cela conduit l’État et les banques dans une impasse, restreignant les retraits sans empêcher la dégradation de la note appliquée récemment par l’agence de notation Moody’s. 

Quelle issue est envisageable face à ce contexte révolutionnaire, cette surdité politique face aux dénonciations populaires et ce risque toujours plus grand de replonger le pays dans une phase de paralysie économique, sociale et politique ? 

Le leader druze Walid Joumblatt représentant le parti socialiste progressiste continue à croire en l’État comme seul refuge afin d’éviter « le chaos ».  Pour George Corm, historien, la crise peut trouver sa sortie par un tout nouvel acte, dit « fondateur », il rejoint alors l’idée d’un nouveau gouvernement, indépendant. 

Les deux points à retenir sont alors les suivants : la nécessité d’un acte, d’un nouveau tournant, et surtout la considération, la représentation d’un leader, capable d’intégrer ce nouveau processus à la crise et d’en rassembler les principaux soutiens.  L’organisation de ces manifestations a été, je le répète, étonnamment pacifique et intelligente. Étendues sur plusieurs pays du globe, les Libanais expatriés ont fait échos aux revendications et ont d’ores et déjà élevés des idées et programmes d’avenir pour leur pays. 

Parmi une multitude d’organisation, NeoLeb cherche à sauvegarder l’espoir libanais pour un renouveau. Elle invite donc à réfléchir aux revendications et aux éventuelles transitions, et à comment rendre efficiente cette révolution aux idéaux démocratiques.  En utilisant internet et les réseaux sociaux, NeoLeb a une visée internationale et permet à des Libanais de participer et transmettre leur avis sur des questions d’expertises notamment sur une potentielle réforme constitutionnelle, ou sur la problématique de l’électricité sur le territoire (toujours dépendant de la Turquie). 

Me Rahija Muslemani avocate canada-libanaise,  est partie intégrante du pôle de réforme constitutionnelle dit « Patriotic Evolutionary Councils – Constitution », elle explique que dans un cadre de « justice participative », le travail de plusieurs juristes consiste à débattre de l’avenir de la question libanaise. L’objectif final est de réaliser des manifestos, un par comité, « en tenant compte des opinions de milliers de Libanais à travers le monde et de différents membres de la société civile (tel que ONE LEBANON etc.), dit-elle. Dépasser le modèle d’un gouvernement recrutant sur les bases de divisions religieuses, dans la mesure du possible, devient prioritaire.  

C’est donc un engagement de long-terme que NeoLeb se prépare à affronter en invitant à l’auto-organisation. Le système mis en place n’est pas complexe mais bien pensé : il y a des conseils Révolutionnaires rassemblant les demandes régionales spécifiques concentrant les revendications particulières à chaque région du Liban. L’objectif est de créer une Demande nationale cohésive à transmettre au régime en place.  À côté de cela, l’exemple donné par Mme Muslemani trouve un sens dans un cadre bien plus grand encore. Les PEC visent à recruter des esprits au Liban et en dehors pour reconstruire le pays. On parle effectivement d’une reconstruction qui n’a jamais eu le temps d’arriver à son terme depuis les déchirures du siècle présent et passé. Alors ces PEC se divisent en des thématiques très précises : ressources, développement, électricité, santé, éducation, technologie, économie, affaires étrangères. 

Les premières marches semblent avoir été surmontées et le modèle révolutionnaire libanais donne ses impressions optimistes que peu sont capables de conférer. 

L’essence de la tolérance habite les Libanais et en profuse alors des rassemblements nationaux et d’une diaspora, unis autour du même message de dénonciation, à la fois d’un gouvernement statique, corrompu et non démocratique. 

« Well, we’ve taken a leap of faith and setup this organization, calling on all Lebanese from all over the world who want to help in any way, to let us know they want to help and under which Council they would like to serve, and what skill-set they bring to the table that would help make this dream a reality. » NeoLeb

Mohamed-Amine KHAMASSI

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Créez un site ou un blog sur WordPress.com

Retour en haut ↑

%d blogueurs aiment cette page :